Avec 14 livres à son actif dont quatre recueils de poèmes, deux pièces de théâtre et trois romans, Hadja Koumanthio Zeinab Diallo s’impose aujourd’hui comme une icône littéraire guinéenne connue à travers le monde. En ce mois de mars, qui est celui dédié aux femmes, nous mettons en lumière cette âme féconde, qui considère son combat pour la littérature comme «une prise d’armes».
Les premiers pas littéraires de HKZD
Exercer sa plume est un héritage pour la première poétesse et troisième romancière de Guinée. Celle que l’on surnomme «Koumanthio la pastorale», vient après Sira Baldé «D’un Foutah Djallon à L’autre» et Kesso Barry «Kesso princesse peulhe».
«Je suis née à Labé au cœur du Foutah Djallon. Le Foutah a engendré des grands érudits qui ont laissé pour la postérité une littérature. Donc mes arrières grands parents et mes parents font partie de ces érudits qui ont laissé à la littérature africaine quelque chose de bien. Le contexte dans lequel je suis née était donc favorable à l’écriture. Je suis arrivée en littérature, c’était pour moi une prise d’armes, parce qu’à cette époque là, il n’y avait presque pas de femmes écrivaines en Guinée. Je fais partie de la première génération des femmes écrivaines du pays. A l’université j’ai écrit un poème intitulé, “Les combattantes“, suite à la marche historique que les femmes de Conakry avaient effectuée, en allant vers Sékou Touré pour dénoncer la police économique d’alors. Je les regardait passer par la fenêtre. J’ai eu la volonté d’écrire et de décrire cette force en mouvement. C’est comme ça que je suis entrée en littérature», confie l’actuelle Directrice générale du Musée du Foutah.
Ségrégation, autocensure, moqueries… HKZD a souffert avant de se faire une place en littérature
«Ça n’a pas été facile pour nous en tant que premières. C’est nous qui avions eu la lourde responsabilité de débroussailler le chemin. Le chemin était plein d’embuches, plein d’estimes, plein de détours qu’on ne pouvait pas toute suite comprendre. On a laissé des plumes partout, mais qu’à cela ne tienne, le résultat est bon, parce qu’on a franchi les caps en faisant des actes nobles. Nous avons écrit, nous avons dénoncé, nous avons chanté, nous avons attiré l’attention (…) car nous les femmes on était ségréguées dans la littérature. Par exemple à Labé j’ai commencé avec certaines, mais qui ont eu peur et elles ont démissionné. Et nous avons été victimes de la société elle-même», rappelle la fondatrice de l’association des écrivains « PEN International de Guinée».
Normal que les femmes prennent la plume
«Comme toutes les femmes d’Afrique, les femmes de Guinée sont entrées en littérature comme une prise d’armes. Elles se servent de cette littérature pour dénoncer des conditions de vie des femmes. C’est intéressant car la plume masculine ne pouvait pas toucher à toutes les réalités que vit la couche féminine. Elles sont mieux placées pour parler de mariages précoces, d’excision et d’avortement, parce qu’elles subissent les douleurs de ces pratiques», se justifie la première romancière du pays, sortie de l’université guinéenne.
La lecture comme conseil pour celles qui veulent s’engager dans la littérature
«Je demande à la génération montante de lire. Si on ne lit pas, on ne peut pas construire quelque chose qui peut être mis dans un livre. Il faut voir d’abord ce qui a été écrit, savoir qu’est-ce qui se passe quand l’auteur met ses idées, son énergie, son cœur et toutes ses tripes dans un livre. Voir quel est le lien qui va naître entre l’auteur et son lecteur. Quand on regarde tout ça, en ce moment il sera très facile d’écrire, d’emprunter le pas à l’auteur. Donc il faut aimer la lecture, pour découvrir les secrets et saveurs que renferment les livres», conseille Hadja Koumanthio aux filles.
Le rôle du gouvernement dans la promotion de l’écriture féminine en Guinée
«L’apport du gouvernement est simple. C’est-à-dire qu’à partir du moment où on a maintenant la politique culturelle, et que le livre et l’écriture ont une place importante dedans, il va falloir qu’on sort les textes des tiroirs et que l’on passe à l’application. Et quand c’est appliqué qu’est-ce qui va arriver ? On va avoir des jeunes filles bien formées, qui seront à l’école, qui ne vont pas interrompre l’école pour aller dans des mariages précoces. C’est celles-ci bien formées, qui vont apprendre très rapidement à lire et nous allons avoir une génération amoureuse de la lecture. Et vite, elles se mettront à l’écriture», préconise l’actuelle Inspectrice Régionale de la Culture, des Sports et du patrimoine historique de Labé.
Toutes les œuvres littéraires de Hadja Koumanthio Zeinabou Diallo
1994 : Moi, femme, poésie.
1996 : Pellun Gondhi, Guinée, Éditions Ganndal.
1997 : Les épines de l’amour, Paris, L’Harmattan.
1997 : Pour les oiseaux du ciel et de la terre, Unicef, poésie,
1998 : Comme les pétales du crépuscule, poésie, Lomé, La Semeuse.
1999 : Comme une colombe en furie, poésie pour enfants, éditions Linda.
2000 : La morte de la guerre, théâtre.
2004 : Daado l’orpheline et autres contes du Fouta Djallon de Guinée, contes, Paris, L’Harmattan.
2004 : Le Fils du roi Guémé et autres contes du Fouta Djallon de Guinée, contes, Paris: L’Harmattan,Préface de Bernard Salvaing.
2005 : Les rires du silence, poésie, Torino, L’Harmattan.
2005 : Les humiliées, théâtre,Paris, L’Harmattan.
2007 : Ngôtté-le-génie de la chasse – conte du Fouta Djallon en Guinée, L’Harmattan.
2014 : Les fous du 7ème ciel ; Au-delà de l’excision, roman, Silex/Nouvelles du Sud.
2017 : Koumanthio Wali Sanè: trois trônes pour une princesse, la Sahelienne.